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REMA 2024 : quand la musique africaine se réinvente

À Ouagadougou, la 7ème édition des Rencontres Musicales Africaines (REMA) a réuni artistes et professionnels autour du thème « L’AfroDigital créatif et économique en émergence ». Cet événement a célébré la musique africaine comme moteur d’innovation et de cohésion, propulsant la culture du continent sur la scène internationale.


L’industrie musicale en Afrique est dynamique et en pleine expansion, jouant un rôle clé dans la culture, l’économie et l’identité des pays. Elle se caractérise par une grande diversité de genres, d’artistes émergents et d’innovations technologiques, tout en faisant face à des défis comme la distribution et la protection des droits d’auteur. Avec la montée des plateformes numériques, elle offre de nouvelles opportunités pour les artistes et favorise la collaboration à l’échelle mondiale.

C’est dans ce contexte africain en pleine mutation, où la musique apparaît comme un puissant vecteur de changement social et économique, que les Rencontres Musicales Africaines (REMA) émergent. Cet événement devient ainsi une plateforme de choix pour explorer les nouvelles tendances de l’industrie musicale, tout en soulignant le potentiel de la culture pour inspirer un développement durable sur le continent.

La 7ème édition des Rencontres Musicales Africaines (REMA) qui s’est tenue du 17 au 19 octobre 2024, Ouagadougou à Canal Olympia Yennenga (Ouaga 2000), s’inscrit dans la même dynamique des éditions précédentes. Cet événement annuel a proposé une programmation riche et variée, incluant des showcases, des keynotes, des meetings, des panels et des conférences. Grande nouveauté cette année : les REMA se délocalise à Bobo-Dioulasso les 25 et 26 octobre, dans le cadre des REMA NEXT , élargissant ainsi leur dimension inclusive.

Placée sous le thème « L’Afro Digital créatif et économique en émergence », cette édition a mis en lumière l’innovation numérique dans le secteur musical africain ainsi que les enjeux qui en découlent dans le contexte africain.

Alif Naaba, directeur des REMA, a rappelé, lors de la cérémonie d’ouverture de cette édition, l’importance des artistes dans la promotion des cultures africaines et la restitution de la dignité des peuples du continent. Il a affirmé que « depuis la nuit des temps, l’Afrique a enrichi le monde par sa musique. Nos cultures ont façonné la vision du monde et ont contribué à faire connaître ce continent riche et multiculturel. »

Malgré le contexte sécuritaire délicat, que connait le Burkina Faso, les REMA 2024 ont mis en avant la résilience du pays. Un pays fier de célébrer la musique avec des amis venus de 25 pays, illustrant « l’inaltérable joie de vivre des Burkinabés », pour paraphraser Jean Emmanuel Ouédraogo, Ministre de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme et Patron des REMA.

l a également souligné l’importance de la thématique de cette année et le rôle clé des REMA dans l’agenda culturel international, notamment dans l’« émergence de nouveaux modes de production, de diffusion et de consommation » dans l’industrie musicale africaine.

Parmi les innovations marquantes de cette édition 2024, la création de REMA PLACE, un espace central regroupant des activités et des stands dédiés aux acteurs de l’industrie musicale. Cet espace abrite également le REMA Village d’enfants, introduisant une dimension éducative qui sensibilise les jeunes à la musique et à la culture à travers des activités ludiques et pédagogiques.

Rappelons qu’Alif Naaba, promoteur des REMA et directeur de l’association la Cour de Naaba, est également Ambassadeur de la fondation Save the Children, qui a bénéficié de visibilité durant REMA 2024. La musique est un puissant moteur de changement social, capable de rassembler les gens autour de causes communes et de sensibiliser aux enjeux sociétaux. Elle sert de moyen d’expression pour des luttes politiques, des revendications sociales et des identités culturelles.

« Libérer la créativité »

Le programme REMA Presse Training, porté par l’association Nord Ouest Cultures et La Cour du Naaba, qui s’est déroulé en deux phases, débutant par une formation en ligne, en amont, où les participants explorent des modules sur le journalisme musical, et les techniques d’écriture critique. Cette phase initiale permet aux journalistes d’acquérir des compétences théoriques solides tout en analysant des œuvres musicales variées.

La deuxième phase s’est déroulé lors du REMA, cela leur offre l’opportunité d’appliquer les connaissances acquises et de bénéficier de retours immédiats sur leur travail. À travers cette initiative, le programme aspire à élever le niveau de la critique musicale, à promouvoir la diversité des expressions artistiques et à renforcer les liens entre les acteurs culturels, contribuant ainsi à un paysage médiatique culturel.

C’est la deuxième année consécutive que nous bénéficions de la confiance de La Cour du Naaba pour la mise en oeuvre de ce dispositif axé sur le renforcement de capacités des journalistes culturels du continent dans la création de contenus sur la musique. Il est important de souligner cette constance et cet alignement des objectifs des deux structures qui souhaitent plus que tout travailler pour la professionnalisation des journalistes.

A chaque fois, nous essayons d’actualiser la formation pour répondre à cette exigence de s’adapter aux besoins contemporains. Je fais référence notamment aux défis de la création de contenus à l’ère du numérique. Je me réjouis de la concrétisation de cet engagement. Et des impacts de sa mise en œuvre » affirme Eustache Agboton, président de l’association Nord Ouest Cultures.

Les trois jours de réflexions, de réseautages et de rencontres étaient centrés sur le thème « Afro-digital créatif et économique en émergence », avec plusieurs panels portant sur la créativité, la mobilité et l’accès à une audience globale, intitulés : « Libérer la créativité », « Briser les frontières » et « Accéder á une audience globale ». Trois thèmes qui jouent un rôle prépondérant dans la dynamique actuelle de l’industrie musicale africaine et reposent á des problématiques et enjeux réels.

Ces panels, modérés par Alain Bidjeck, directeur des MOCA, ont réuni des experts éminents du secteur tels que Journey Ramadhan (Festival …. Zanzibar), Magali Wora ( Hema Online Music Academy ), Guy Constant Neza ( Believe – Cote d’Ivoire), Lucy Ilado ( Programne Sellam  ) et Abou Kamaté (MASA – Cote d’Ivoire).

Les échanges, et les débats ont exploré comment le digital influence aujourd’hui l’employabilité, la production et la diffusion de la musique en Afrique. Pourquoi Afro ? Il s’agit là d’une introspection centrée sur nos réalités socio-économiques et culturelles.

Un panel hors-série, organisé par le PNUD Burkina et la Cour de Naaba, portait sur thème : « La musique : un langage qui nourrit la cohésion sociale ». Le panel a réuni divers acteurs culturels du Burkina Faso : Dieudonné Kini (PNUD Burkina) ; Hamadou Mande (directeur artistique du FITMO), Issoufou Sare, (directeur général de BF1), Alif Naaba, (directeur des REMA).

La musique transcende les frontières culturelles et linguistiques, jouant un rôle essentiel dans l’affirmation des identités et la promotion de la diversité. Elle participe pleinement á l’atteinte des Objectifs de Développement Durable (ODD) des Nations Unies, en utilisant son pouvoir d’influence pour sensibiliser et mobiliser les communautés. Elle peut aborder des thématiques telles que la lutte contre la pauvreté (ODD 1), l’éducation de qualité (ODD 4) et l’égalité des genres (ODD 5).

Divers ateliers autour des métiers de la musique, tels que la gestion de projet, la distribution et le beatmaking, ont également été proposés. La question de la propriété intellectuelle a été débattue avec la présentation par Didier Awadi, artiste et producteur, de la plateforme CLIP (Creator Learn Intellectual Property), développée en partenariat avec l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) et la Music Rights Awareness Foundation (MRAF).

Côté musique, la cérémonie d’ouverture a été ponctuée par des performances mémorables, dont celles de plusieurs artistes émergents tels qu’Ami Yerewolo (Mali), Diane Beza, Adango (Cameroun) et Diyane Adams (Sénégal). Ces jeunes talents ont eu l’occasion de révéler leur créativité devant un public passionné et des professionnels de l’industrie, faisant de cet espace une opportunité unique pour se faire repérer.

Au-delà de la simple performance scénique, ces showcases sont un outil puissant de réseautage, permettant aux artistes issus de différentes cultures musicales africaines de se rencontrer, d’échanger et de s’inspirer mutuellement. Ce croisement de styles et d’approches créatives renforce la dynamique musicale africaine, la rendant plus diversifiée et accessible à l’échelle mondiale.

Conformément à la tradition, les REMA se sont conclues par le Grand Concert, rebaptisé REMA Play, au Monument aux Héros Nationaux. Ce concert a réuni des artistes confirmés tels que Kandi Guira (Burkina Faso), Didier Awadi (Sénégal), Didi B (Côte d’Ivoire) et Inoss B (Congo), offrant ainsi au public une soirée riche en émotions et en musique.

Les REMA 2024 ont consolidé leur position de rendez-vous incontournable de la musique africaine. En combinant réflexion, innovation, créativité et opportunités de réseautage, cet événement va bien au-delà d’une simple fête. Il offre une plateforme solide et engagée pour professionnaliser les acteurs de la musique, tout en propulsant les cultures africaines sur la scène internationale.

Les acteurs des ICC en Algérie, au-delà du seul domaine de la musique, auraient tout intérêt à participer à des événements panafricains d’une telle qualité et d’un tel rayonnement que les REMA. Nous partageons des problématiques similaires.