La maison d’édition Tafat annonce son exclusion du Salon international du livre (SILA) pour la deuxième année consécutive. Une décision dénoncée par son directeur, Tarek Djerroud, qui parle d’un « acharnement » et d’une « volonté de nuire » orchestrés par l’actuel commissaire du salon.
Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, Tarek Djerroud ne cache pas sa colère : « Aujourd’hui, je suis en colère. Je suis très en colère. À quelques heures de l’inauguration du SILA, nous constatons pour la énième fois la continuité d’une manœuvre nauséabonde. Il ne s’agit pas d’une erreur, il s’agit bel et bien d’un acharnement ».
L’éditeur explique avoir contacté le commissariat à plusieurs reprises. En vain. « Nous n’avons pas encore reçu la réponse à un courrier électronique que nous avons adressé au commissaire du SILA. J’ai envoyé ce courrier en date du 16 septembre 2025, pour demander clairement des explications sur cette éviction, aussi injuste qu’outrageante que subit Tafat de la part du commissariat ».
Il rappelle: « Avant en 2017, les lecteurs, les visiteurs du SILA admiraient, s’arrêtaient devant notre stand en foule. Il y avait la foule autour de nos publications. Nous faisons de notre mieux pour vulgariser des thématiques, promouvoir des auteurs ». Selon lui, cette réussite aurait déplu au commissaire du salon. « Ce succès, nos choix et éditoriaux n’étaient pas du bon goût du commissaire du SILA, surtout de l’actuel », dit-il.
« Vous faites de la politique… »
L’histoire de Tafat avec le SILA n’est pas récente. En 2018, la maison a déjà été victime d’un « acte d’invisibilisation ». « On nous a arraché à notre place habituelle pour nous jeter dans un coin perdu. L’acharnement ne s’est pas arrêté là. L’année suivante, c’est la même chose. On nous attribue un angle perdu. L’année d’après, pareil».
Tarek Djerroud dénonce également les accusations implicites du commissaire concernant sa supposée implication politique. « En 2022, j’ai été au siège du SILA à l’ENAG, et il m’a t dit que je faisais de la politique. Je tiens à rappeler que je n’appartiens à aucun parti politique. Mais faire de la politique n’est pas un délit. Où est le problème ? La Constitution l’autorise ».
L’éditeur insiste sur le caractère qu’il juge arbitraire de l’exclusion. « En 2024, j’ai envoyé une lettre au commissariat du SILA pour demander pourquoi notre maison ne peut pas participer. Aucune réponse. Cette éviction est arbitraire. Peut-être le mot n’est pas fort. C’est l’incarnation de la bêtise ». Il rappelle aussi le cadre légal. « Aucune loi en Algérie n’autorise un commissaire du SILA à censurer ou à entraver le travail d’une maison d’édition. Seule une justice souveraine peut interdire nos livres ».
Pour rendre son propos accessible, Djerroud multiplie les métaphores. « Imaginez, dans une classe, que l’instituteur décide que deux élèves ne participent pas à l’excursion alors que les autres y vont. Comment qualifier cet instituteur ? Ou imaginez que le président de la FAF décide qu’un club ne participe pas à la coupe d’Algérie, sans raison. C’est scandaleux, sur quel fondement ? Aucun ».
Malgré ce qu’il appelle un « bannissement » et un « mépris », Tafat entend poursuivre sa mission. « Nous restons attachés à notre lignée éditoriale et à nos valeurs. Nous continuons à travailler, à dénoncer les ennemis de la liberté d’expression et à défendre notre droit à travailler ».
L’éditeur invite les lecteurs à se tourner vers les librairies pour découvrir ses publications. « Retrouvez nos livres auprès de votre libraire habituel. Nous recevons beaucoup de messages de soutien et nous vous donnons rendez-vous cette année uniquement dans les librairies ».