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Passeports diplomatiques: Macron acte la suspension  de l’accord de 2013


Bruno Retailleau le réclame depuis plusieurs mois, Emmanuel Macron passe à l’acte: le président français demande, dans une lettre adressée mercredi à son Premier ministre, de notifier aux autorités algériennes la suspension officielle de l’accord de 2013.

Macron demande également à ce que son ministre de l’Intérieur obtienne de ses pairs des Etats Schengen de consulter la France avant la délivrance des visas de court séjours pour les responsables algériens.

«J’ai bien noté que de premières mesures ont été prises à l’égard de hauts responsables algériens qui pourraient vouloir se rendre dans notre pays. Il ne faut toutefois acter à présent la suspension officielle de l’accord de 2013 que concernant les exemptions de visa sur les passeports officiels diplomatiques, suite à la mesure prise par les autorités algériennes à cet égard. Je vous demande donc que le ministre de l’Europe et des Affaires Étrangères notifie aux autorités algériennes la suspension formelle de cet accord», recommande Macron.

Appel à la solidarité des partenaires Schengen

Le président Français, qui sort de la position de prudence dans laquelle il était cantonné depuis l’éclatement de la crise entre Alger et Paris, s’illustre dans un ton affranchi de toute précaution diplomatique.

« Je vous prie également de solliciter du ministre de l’Intérieur qu’il obtienne de nos partenaires Schengen qu’ils prennent les mesures indispensables à l’efficacité de nos décisions, tout particulièrement la consultation de la France pour la délivrance des visas de court séjour pour les responsables algériens en question et les passeports visés par cet accord», ajoute-t-il à l’adresse de François Bayrou.

Le locataire de l’Élysée ne s’arrête pas à ces deux seules recommandations au gouvernement français. Il va plus loin que ne l’aurait espéré son ministre de l’Intérieur.

«Je vous invite également à activer les dispositions que nous avons élaborés en janvier 2024 dans le cadre de la loi pour contrôler l’immigration et améliorer l’intégration (CIAI). Son article 47, dont j’ai souhaité l’aboutissement, a créé un levier visa-réadmission (LVR) national qui permet de refuser les visas de court séjour aux détenteurs de passeports de service et diplomatiques, tout comme les visas de long séjour à tous types de demandeurs», recommande encore le président français qui souhaite que ces mesures soient mises en œuvre immédiatement.  

Le retour de l’ambassadeur de France en Algérie conditionné

Le président français dit, dans sa lettre à François Bayrou, qu’il reste attentif à la situation de l’ambassade de France à Alger. Il conditionne le retour de l’ambassadeur à son poste par la levée «des entraves à son action».

« Les mesures d’entrave que les autorités algériennes ont prises à son égard ont pour effet automatique, d’après et déjà, une baisse de 30% de la délivrance des visas, compte tenu du manque d’effectifs consulaires autorisés à rejoindre nos services des visas en Algérie et de la moindre capacité à traiter la demande qui en découle. Le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères et ses services pourront prévenir les autorités algériennes que tout retour à la normale dans notre coopération nécessitera que notre ambassade à Alger recouvre les moyens de son action. C’est à cette condition que notre ambassadeur pourra rejoindre son poste».

« Dans le même esprit, lorsque vous estimez que les conditions sont réunies s’agissant du fonctionnement de notre dispositif diplomatique, vous pourrez autoriser les trois consulats algériens déjà présent sur notre territoire à exercer leur mandat, en exigeant toutefois une reprise de la coopération migratoire par les services placés sous leur autorité (reprise prioritaire dès délivrances des laissez-passer consulaires et des réadmissions, en particulier pour les individus plus dangereux. Seule cette reprise nous permettra d’admettre cinq autres consuls en attente d’autorisation», exige encore Macron.

Dette hospitalière

Le président Français veut aussi que d’autres dossiers sensibles soient mis sur la table, si le dialogue entre Paris et Alger viendrait à reprendre.

« La réponse des autorités algériennes à nos exigences en matière de coopération migratoire et consulaire déterminera la suite de nos démarches. Dès lors que le dialogue aura été rétabli, il nous faudra également traiter d’autres dossiers sensibles, tels que la dette hospitalière, ou les menées de certains services de l’Etat algérien sur le territoire national; mais également les questions mémoriels en suspens, notamment la question des restitutions ou des sites des essais nucléaires français en Algérie».

Les autorités algériennes ne manqueraient de réagir à cette sortie de Macron, comme elles l’ont fait jusque-là à chaque fois que s’élève une surenchère su côté de l’Hexagone. Le ton à l’égard du président français, jusqu’ici soustrait à la diatribe politique, devrait changer, tant est que ce dernier met ses pas dans ceux de son ministre de l’Intérieur.