Dans le gouvernement de Sifi Ghrieb, nommé le dimanche 13 septembre 2025, un siège est revenu au wali d’Alger. Mohamed Abdennour Rabhi est désigné, en effet, ministre, wali d’Alger. Parmi ses collègues du reste des wilayas, il est le seul à jouir d’un tel statut.
Légalement, rien ne s’oppose à la création d’un portefeuille ministériel et à la désignation de son titulaire. Cependant, l’élévation du wali d’Alger au rang de ministre, tout en le maintenant dans ses fonctions de premier responsable de la wilaya, ne peut pas se passer de commentaires.
Hormis son statut de capitale du pays, rien d’autre, au plan administratif, n’est promulgué qui distinguerait davantage Alger des autres wilayas. Pourquoi alors un ministre-wali pour Alger et pas de même pour des wilayas comme Oran et Constantine, par exemple?
Alger, capitale, est, il est vrai, le siège des institutions politiques : gouvernement, parlement, ambassades et autres représentations internationales. Soit, mais cela n’a pas empêché qu’elle eut été toujours administrée par un wali, hormis durant la parenthèse du gouvernorat du Grand Alger (1997-2000).
Ministre-wali, une exception Rabhi ?
La promotion de Mohamed Abdennour Rabhi au rang de ministre tout en le maintenant wali ne fait pas suite à un amendement du statut de la wilaya d’Alger. Dans les textes, Alger demeure une circonscription territoriale comme tant d’autres. C’est par quoi d’ailleurs le Conseil constitutionnel, saisi par le défunt président Bouteflika, avait argumenté son avis sur l’inconstitutionnalité du « gouvernorat du Grand Alger ».
Le statut d’Alger n’ayant pas évolué, aussi la question qui se pose est celle de savoir. Les futurs walis de la capitale auraient-ils automatiquement le statut de ministre ? Ou Mohamed Abdennour Rabhi en ferait-il exception ? Pour le moment, aucun texte n’y institue une automaticité. Aucun autre ne l’y exclut, non plus. L’octroi du statut relève du pouvoir discrétionnaire du chef de l’État.
La question sous-jacente est celle de savoir, par ailleurs, si la perte de l’une des deux fonctions cumulées du wali d’Alger entraînerait automatiquement l’autre ou pas. Si Mohamed Abdennour Rabhi viendrait à être débarqué du gouvernement, perdrait-il, du même coup, son poste de wali ? Ou s’y maintiendrait-il ? Inversement, resterait-il ministre s’il n’est plus wali d’Alger?
Les deux fonctions de ministre et de wali étant des charges exécutives et non des mandats électifs, la perte de l’une des charges devait logiquement entrainer l’autre. C’est valable en tout cas dans la situation où le ministre-wali perd son poste de wali.
Gouvernorat du Grand Alger : trois ans d’inconstitutionnalité
En 1997, en plein décennie noire, Alger, la capitale algérienne, a vu blinder son statut. Une ordonnance signée par le Président Liamine Zeroual lui confère le statut de « gouvernorat du Grand Alger ». Un ministre-gouverneur est désigné pour l’administrer, en la personne de Cherif Rahmani.
L’ordonnance en question, qui porte le numéro 97-15 est signée le 31 mai 1997. Elle définit un statut particulier pour Alger. Un statut qui fait d’elle une circonscription administrative à part, avec, pour le ministre-gouverneur, des prérogatives élargies. Les mauvaises langues parlèrent à l’époque «d’un État dans l’État».
L’ordonnance n°97-15 dispose dans son article 4 que « le gouvernorat du Grand Alger est organisé en communes urbaines et en communes (liste annexée, ndlr), es communes urbaines sont dénommées arrondissements urbains et constituent la ville d’Alger ». Et, dans son article 5 que « le gouvernorat du Grand Alger est administré par les organes suivants, chacun dans la limite de ses compétences : le ministre gouverneur du Grand Alger, l’Assemblée populaire de wilaya, dénommée Conseil du gouvernorat du Grand Alger et le président du Conseil du gouvernorat du Grand Alger ».
La création du gouvernorat du Grand Alger, formalisée par la promulgation d’une ordonnance, s’était accompagnée par la récupération annexion à Alger de quelques communes qui relevaient des wilayas limitrophes Tipaza, Blida et Boumerdes. Alger a vécu avec ce statut de gouvernorat du Grand Alger durant 3 ans.
Une année après son arrivée au pouvoir, le président Abdelaziz Bouteflika fait revenir Alger à son statut antérieur, celui d’une wilaya comme les autres. Il saisit, pour ce faire, le Conseil constitutionnel pour avis sur la constitutionnalité du statut du gouvernorat du Grand Alger octroyée à Alger depuis 1997. Dans son Avis rendu le 1er mars 2000, le Conseil constitutionnel tranche : l’ordonnance n°97-15 est anticonstitutionnelle.