Jeudi 17 décembre, le tribunal administratif de Nantes, en France, a rejeté plus d’une centaine de recours déposés par des ressortissants étrangers résidents en France, qui ont obtenu le droit d’effectuer un regroupement familial, mais aux familles desquels l’administration française refuse de délivrer des visas.
Les procédures de regroupement familial étaient gelées depuis le mois de mars, du fait de la fermeture des frontières françaises lors du premier confinement pour contenir l’épidémie de Covid-19. Or, pendant l’été, le gel des procédures n’a pas été levé, sans qu’aucune explication ne soit donnée aux personnes concernées.
Au mois de novembre, plusieurs personnes qui ont saisi le tribunal administratif ont obtenu gain de cause. Ainsi, au moins deux Algériens et un Ivoirien ont pu faire venir leurs familles. Le tribunal de Nantes a, par ailleurs, condamné le ministère de l’Intérieur à payer 500 euros de dommage à un plaignant algérien.
Pour aller plus loin
Dans la foulée, environ 200 personnes ont déposé, à leur tour, des référés au tribunal administratif. La moitié d’entre eux, ayant sollicité le même avocat, a reçu un message de ce dernier jeudi 17 décembre, indiquant qu’il était « à craindre que l’ensemble des requêtes (…) fassent l’objet d’un rejet ». L’avocat souligne à ses clients que la justification du tribunal administratif de Nantes ne lui semble pas sérieuse: « Il nous semble donc que le Juge des référés a utilisé un motif de pure opportunité, très contestable juridiquement, pour s’épargner d’avoir à traiter ce contentieux de masse ».
La décision suscite l’incompréhension des demandeurs : « On se pose des questions sur l’indépendance de la Justice. Puisque le tribunal donne raison à plusieurs personnes, le ministère est forcé à délivrer les visas, et d’un seul coup, tout est rejeté d’un bloc sur une question de forme », soupire une Algérienne, séparée de son mari depuis bientôt un an.
Des associations saisissent le Conseil d’État
Le ministère de l’Intérieur français n’a d’ailleurs toujours pas formellement expliqué l’arrêt de la délivrance des visas. Dans une déclaration au journal français Le Monde publiée le 27 novembre, il expliquait : «Les bénéficiaires du regroupement familial ne font pas partie des publics prioritaires». L’ambassade de France à Alger, contactée par Twala, ajoute : « Les familles bénéficiant du regroupement familial ne sont pas autorisées à ce stade à franchir la frontière ».
Vendredi 11 décembre, 25 députés français ont écrit au ministre de l’Intérieur pour demander la délivrance de visas aux familles de ressortissants étrangers installés en France. Les demandes précédentes de plusieurs députés étaient restées sans réponse. Enfin, neuf associations membres de la coordination française pour le droit d’asile, le syndicat des avocats de France, l’association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers et les Avocats pour la défense des droits des étrangers ont saisi le 16 décembre 2020 le juge des référés du Conseil d’État.