La Grande Mosquée de Paris a annoncé, mardi 16 septembre, avoir saisi l’Arcom. Cette démarche fait suite à des propos tenus la veille sur BFM qualifiant la langue arabe de « langue musulmane » et même de « langue islamiste ». Dans un communiqué, son recteur Chems-eddine Hafiz dénonce une « musulmanophobie en direct ». Il appelle à mettre fin à « l’impunité » face à ce type de dérives.
Pour l’institution, ce type d’amalgame, tenu devant des millions de téléspectateurs en prime time, réduit « un univers culturel et linguistique à une menace supposée ». De tels discours installent dans l’opinion publique l’idée que tout ce qui touche à l’islam relèverait d’un problème sécuritaire. Cette dérive, selon la Grande Mosquée de Paris, banalise la haine et frappe indistinctement les Français de confession musulmane, pratiquants ou non.
Pour étayer son propos, l’institution cite une enquête Ifop. Les résultats sont sans appel : 66 % des Français musulmans déclarent avoir subi un comportement raciste au cours des cinq dernières années. En revanche, seulement 20 % de l’ensemble de la population rapportent ce type d’incidents. Ce fossé, selon la Grande Mosquée, « révèle une réalité inacceptable : ces citoyens subissent trois fois plus de discriminations que leurs compatriotes d’autres confessions ». Elle dénonce ainsi une double peine : subir au quotidien des actes antimusulmans et voir ces comportements légitimés, voire encouragés, par des propos diffusés sur des chaînes nationales.
La Grande Mosquée de Paris a donc décidé de saisir l’Arcom, l’autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique. Elle souhaite que « l’impunité cesse ». Elle insiste sur la responsabilité particulière des médias dont le rôle est d’éclairer et non de « devenir des vecteurs de haine et de stigmatisation ». Pour Chems-eddine Hafiz, les propos tenus sur BFM constituent une « faute professionnelle et morale ».
Lutte contre la musulmanophobie
Le recteur rappelle également que la liberté d’expression protège le droit de critiquer une religion. Mais « jamais celui de cibler, d’humilier ou de discriminer des personnes pour leur foi ». À ses yeux, « une ligne rouge a été franchie, une fois de plus, au mépris de la dignité de millions de citoyens français ».
Au-delà de la dénonciation ponctuelle, la Grande Mosquée de Paris replace cette affaire dans un combat plus large : celui contre la musulmanophobie. « Ce n’est pas une revendication communautaire, ni un débat partisan, mais un devoir républicain », insiste Chems-eddine Hafiz. Le communiqué conclut en appelant la République à protéger tous ses enfants, « Français de confession musulmane, y compris les non-pratiquants », contre la stigmatisation médiatique et politique qui les vise.
Cette dérive illustre une fois de plus les tensions autour de la place de l’islam et de la langue arabe dans le débat public français. Pour la Grande Mosquée de Paris, l’enjeu dépasse la simple condamnation d’un propos maladroit. Il s’agit de rappeler qu’aucun citoyen ne doit être réduit à sa religion ou à ses origines linguistiques. En s’adressant directement à l’Arcom, l’institution envoie un signal clair : les dérapages médiatiques ne peuvent plus être tolérés.